Une partie de cet article a été rédigé grâce à de bons vieux cerveaux humains !
Après la communauté de l’enseignement, le monde de la recherche se fait également bousculer par l’arrivée de l’intelligence artificielle (IA). Les chercheuses et les chercheurs doivent maintenant réviser des articles scientifiques « rédigés » par des pairs, mais qui peuvent avoir été écrits en grande partie par l’IA. Les étudiantes et étudiants aux cycles supérieurs peuvent recourir à l’IA pour les aider à rédiger une partie de leur mémoire de maîtrise et de leur thèse doctorale. Comment réagir ?
Nous sommes deux chercheurs de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), dont l’un utilise et développe des algorithmes d’IA dans le cadre de ses recherches depuis 2004 – principalement pour le traitement de données géoscientifiques et l’autre s’y initie progressivement afin de maximiser ses efforts pour concilier toutes les sphères de la vie académique. Surtout, nous voulons informer nos pairs que ces outils existent.
Peu de politiques universitaires existantes
Peu d’universités ont publié des politiques claires sur l’usage de l’IA en recherche. Depuis la sortie officielle de ChatGPT d’OpenAI en 2022, on a pourtant affaire à un raz-de-marée significatif pour la communauté scientifique, auquel il importe de réfléchir. Cela dit, plus le temps file, plus le fossé se creuse entre les chercheuses et chercheurs qui l’utilisent et ceux qui ne l’utilisent pas encore.
Parmi les universités qui ont commencé à penser à des politiques encadrant l’utilisation de l’IA générative, il y a le Massachussetts Institute of Technology. Une des recommandations principales émises par l’université consiste à déclarer quand et quelle IA a été utilisée au cours de l’idéation, de la recherche et de la rédaction.

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Contrairement aux ressources informatiques conventionnelles (Stackoverflow, Google, etc.), il semble y avoir un tabou à reconnaitre l’utilisation d’un algorithme d’IA générative dans les références ou les remerciements des articles et des rapports scientifiques.
Le gain d’efficacité est surprenant
Tout comme l’accès aux ordinateurs personnels a été une révolution de productivité, l’arrivée de l’IA générative a augmenté la productivité dans certains domaines de la recherche.
L’IA générative la plus connue est ChatGPT et elle comporte plusieurs « sous-GPT », dont « ScholarGPT ». Ce dernier peut faire des revues de littérature sur des sujets donnés. Il peut faire des évaluations d’articles, de mémoires, de thèses, de livres. Il peut réviser des applications de financement. Il peut faire la synthèse de curriculum vitæ et écrire des lettres de recommandation.
Le sous-GPT « Logo Creator » peut quant à lui générer rapidement des logos, tandis que le sous-GPT « DALL-E » peut générer des schémas et des illustrations de qualité. Comme ces différents programmes sont tous interreliés, finis le copier-coller de l’un à l’autre.
L’IA « Perplexity », de son côté, est capable de fournir des réponses élaborées basées sur plusieurs IA génératives. Lorsqu’il répond à une question qu’on lui pose, Perplexity fournit par ailleurs les références qu’il a utilisées pour générer sa réponse.
Est-ce éthique ? Est-ce équitable ?
Nous pensons qu’il importe d’utiliser cette nouvelle technologie avec précaution et qu’il faut encore un cerveau humain pour vérifier les réponses, car pour l’instant, les IA génératives sont des oracles qui sont basées sur la probabilité du prochain mot dans une phrase. Ils ne sont donc pas conscients du cadre général de la question. Des travaux sont faits dans ce sens pour ajouter du contexte à la réponse comme dans ChatGPT 10.
La plupart des programmeuses et des programmeurs utilisent de l’IA générative, car elle fait partie intégrante des environnements de programmation comme dans Google Colab, VSCode ou PyCharm. Il est difficile désormais de différencier quelle ligne a été complètement écrite par un être humain, ou s’il a utilisé les suggestions de son IA préférée.
La plupart des journaux scientifiques et universités ont commencé à se questionner pour développer des politiques afin d’encadrer l’usage de l’IA. Dans la mesure toutefois où l’outil est là, doit-on attendre que des politiques soient mises en place avant de l’utiliser ?
Comment ChatGPT peut optimiser le travail des chercheuses et chercheurs
Le 3 décembre 2024, nous avons posé cette question à ChatGPT : « Peux-tu nous rédiger un texte qui explique comment ChatGPT peut optimiser le travail des chercheurs académiques ? » Voici sa réponse :
L’essor de l’intelligence artificielle (IA) offre aux chercheurs académiques des opportunités inédites pour optimiser leurs activités de recherche, d’analyse et de communication scientifique. ChatGPT, un modèle avancé de traitement du langage naturel, peut agir comme un assistant polyvalent pour les chercheurs, leur permettant de gagner du temps, d’améliorer la qualité de leurs productions et de favoriser l’innovation.
1. Assistance dans la recherche documentaire
ChatGPT peut rapidement fournir des résumés de concepts, des synthèses d’articles scientifiques, ou des informations contextuelles sur un sujet donné. Cela permet de : a) Identifier les tendances actuelles de la recherche ; b) Comprendre rapidement des domaines interdisciplinaires et c) Trouver des références pertinentes (même si elles doivent être vérifiées via des bases de données comme PubMed ou Scopus).
Exemple : Un chercheur en écotoxicologie peut demander un aperçu des dernières avancées dans l’étude des perturbateurs endocriniens et obtenir une synthèse des principales études.
2. Rédaction et révision de manuscrits
ChatGPT peut aider à la rédaction d’articles, rapports ou présentations : a) Rédaction préliminaire : Générer une ébauche d’introduction ou de discussion basée sur les résultats fournis ; b) Amélioration linguistique : Reformuler des phrases complexes pour les rendre plus claires et concises et c) Traduction scientifique : Traduire des articles ou résumés dans d’autres langues tout en préservant la précision scientifique.
Précaution : L’utilisation de ChatGPT pour rédiger des parties de manuscrits scientifiques doit respecter les directives éthiques des revues académiques.
3. Analyse et visualisation des données
Bien que ChatGPT ne remplace pas des outils spécialisés comme R ou Python pour les analyses quantitatives complexes, il peut : a) Expliquer des concepts statistiques ou des modèles mathématiques ; b) Proposer des approches pour analyser un jeu de données et c) Assister dans l’interprétation des résultats.
Exemple : Si un chercheur a des données sur les biomarqueurs de stress chez des poissons exposés à des contaminants, ChatGPT peut suggérer des méthodes pour identifier des corrélations significatives.
4. Optimisation de la communication scientifique
La communication est un pilier de la recherche, et ChatGPT peut être utilisé pour : a) Élaborer des vulgarisations scientifiques pour des audiences non spécialisées ; b) Préparer des diapositives, des scripts ou des affiches de conférence et c) Formuler des réponses aux commentaires des relecteurs lors de la révision des articles.
Exemple : Pour une présentation destinée au grand public, ChatGPT peut reformuler des termes techniques pour les rendre accessibles.
5. Génération d’idées et brainstorming
ChatGPT peut être utilisé comme un outil de brainstorming pour générer des idées novatrices ou explorer de nouvelles hypothèses. Par exemple : a) Proposer des approches expérimentales alternatives ; b) Identifier des lacunes potentielles dans la littérature existante et c) Suggérer des collaborations interdisciplinaires.
6. Gain de temps et automatisation
En automatisant des tâches répétitives, ChatGPT permet aux chercheurs de se concentrer sur des activités à forte valeur ajoutée : a) Réponses standardisées à des courriels académiques ; b) Rédaction de lettres de motivation pour des bourses ou projets et c) Création rapide de plans de cours ou de supports pédagogiques.
7. Limitations et considérations éthiques
Malgré ses nombreux avantages, ChatGPT présente des limites : a) Vérification des informations : ChatGPT peut générer des réponses incorrectes ou non fondées. Les chercheurs doivent toujours valider les informations obtenues ; b) Propriété intellectuelle : Les contributions générées par l’IA doivent être signalées pour éviter tout problème éthique et c) Sensibilité des données : Il est déconseillé d’utiliser ChatGPT pour traiter des données confidentielles ou sensibles.
On l’utilise ou pas ?
En tant qu’outil d’IA, ChatGPT peut grandement faciliter le travail des scientifiques en leur fournissant un support flexible et rapide. Bien qu’il ne remplace pas l’expertise humaine, il agit comme un levier d’efficacité, permettant aux chercheuses et chercheurs de consacrer davantage de temps à l’exploration scientifique et à l’innovation.
Toutefois, une utilisation judicieuse, éthique et encadrée reste essentielle pour maximiser ses avantages tout en minimisant les risques.
L’avènement de l’IA en recherche risque d’être tout aussi important que l’invention du moteur à combustion ! On n’arrêtera pas le progrès, alors mieux vaut se former comme on l’a fait jadis avec l’utilisation de l’ordinateur ou de l’Internet. Il est primordial que les universités développent rapidement des politiques d’utilisations de ces nouveaux outils avant que l’inégalité dans la productivité ne creuse des ravins encore plus profonds entre toutes les institutions de recherche internationales.
En attendant le son de cloche, on vous souhaite bonne initiation !